• Je vais essayer d'expliquer le plus simplement que je peux ce qu'est l'écriture idéographique japonaise pour ceux qui ne savent pas de quoi il s'agit.
    (et parce qu'on m'a posé la question) ♬

    • Partie 1


    Au départ, en Chine, étaient des dessins, des pictogrammes, dont on a retrouvé des exemplaires sur des os ou des coquilles et qui constituent la plus lointaine étymologie des caractères qu'on utilise aujourd'hui. 

    Pour transmettre des idées, les humains avaient trouvé qu'ils pouvaient dessiner. Par exemple, pour dire «main» ils dessinaient une main, pour dire «long», ils dessinaient un homme avec des cheveux longs qui flottaient au vent, pour dire «1» ils dessinaient un bâton couché (ben oui, ils écrivent verticalement, alors leurs bâtons sont horizontaux, c'est l'inverse pour nous), pour dire «arbre», ils dessinaient un arbre, etc. 

    Bien sûr il a fallu se mettre d'accord sur ces codes, mais cela restait tout de même du dessin. Il y a donc eu tout un tas de symboles dessinés, de pictogrammes, pour représenter des idées simples, visibles, palpables.

    Puis il a fallu inventer une façon d'exprimer des concepts un peu moins «dessinables». Comment faire? Par exemple, comme on peut utiliser la main droite encore et encore parce qu'elle est plus forte que la gauche, le pictogramme pour «main droite» a commencé à prendre aussi la signification de «encore». Par exemple, parce que pour pousser les cheveux ont besoin de temps, le pictogramme pour «long» a commencé à signifier aussi «âgé».

    Cela faisait déjà deux séries, le sens concret et le sens figuré des pictogrammes. Cependant, il restait encore beaucoup de choses inexprimables avec ces deux sortes de dessins. Des idées complexes, qui impliquaient plusieurs concepts, des idées abstraites, etc. 

    Comment faire?

    Je voudrais dire «repos», mais c'est une idée abstraite, comment la dessiner? 

    Je vais prendre la situation commune de la personne qui se repose, autrement dit celle qui travaille au champs et qui pour faire une pose s'appuie contre un arbre pour reprendre des forces. Il s'agit d'un homme contre un arbre. 

    Ah, ça tombe bien, j'ai déjà un picto pour arbre et un autre pour homme. Super, je vais coller les deux ensemble en les serrant un peu (mon dessin de chaque picto va très légèrement changer) pour que ça rentre dans une seule case.

    Pour qu'on comprenne bien que c'est une seule idée, il fait que ce soit un seul caractère, n'est-ce pas?

    Donc avec le caractère 人 homme légèrement modifié en 亻et le caractère 木 arbre collés ensemble on obtient le caractère 休 repos.

    En assemblant deux caractères, on peut déjà exprimer pas mal d'idées, mais en en assemblant trois, quatre ou beaucoup plus on peut enfin exprimer des idées très abstraites. Par exemple, le caractère pour censure 劾 parle de la force avec laquelle on met un couvercle sur des êtres humains. Pas mal non?

    Et pour faire loger tout ça dans un seul caractère, il faut parfois trouver certaines astuces, certaines distorsions d'écriture.

    Il existe des briques de base qu'on utilise et sur lesquelles on construit un caractère complexe (pas nous, mais ils ont été construits comme ça). On appelle ces briques de base «radicaux» ou «clefs». 

    De la même façon qu'en français on peut utiliser un même radical pour former plusieurs mots, si on considère qu'un caractère est un mot, alors c'est vraiment similaire! Par exemple avec le radical «herbe» je peux construire «herbeux», «herbage», «herbacée», «herbicide», etc. Et bien avec le radical 艸 herbe, je peux construire 花 fleur, 苗 semis et 403 autres caractères.

    Dooooonc...

    Si je connais les radicaux, je vais plus facilement comprendre de quoi parle un caractère que je n'ai encore jamais vu en m'aidant du contexte et je vais donc pouvoir lire en recourant de moins en moins au dictionnaire.

    Si je connais les radicaux, je vais plus facilement me souvenir de la construction des caractères et retenir les kanjis sans avoir besoin d'astuces différentes pour chaque.

    Il y a 50 000 kanjis, et «seulement» 214 radicaux. Un peu comme des briques élémentaires de légo construisent une maison, en apprenant les 214 briques de base, vous saurez ce que sont les maisons construites avec.

    • Partie 2

    Les idéogrammes ont une signification. Bon. Jusque là ça va. Mais sans doute que les hommes qui les écrivaient leur ont donné une prononciation, non? genre «homme» pour le dessin de l'homme. Et bien oui. Chaque caractère se prononce. Mais. deux aspects sont à prendre en compte.

    Premier aspect:
    Imaginez un langage avec plein de mots dedans et pas d'écriture. Si j'invente un symbole pour dire «homme» je vais le dire «homme», mais je vais aussi le mettre dans des mots pour dire «repos», et alors je vais garder l'idée mais pas la prononciation. Je vais continuer de dire «repos» et pas «homme», même si c'est le nom de mon dessin de base.

    Second aspect:
    D'un autre côté, si j'ai plein de mots dans lesquels j'entends «ome» (écrit 人), je vais être tenté d'abréger avec mon symbole 人, surtout si le mot (qui n'a sans doute rien à voir) s'écrit avec un idéogramme plus compliqué. Par exemple, j'écrirais «écon人» au lieu de «économe». hahaha. désolée pour le mix, mais vous voyez peut-être où je veux en venir (?).

    Il y a donc des situations ou le symbole est utilisé pour sa valeur symbolique et d'autres fois pour sa valeur sonore.

    Vous suivez toujours?

    • Partie 3

    Tout ça, c'est pour le Chinois. Bon. 
    Et pour le Japonais alors? 
    Et bien on en rajoute une couche. 
    Parce que, en passant de Chine au Japon, les idéogrammes se sont collés sur une langue préexistante. 
    Alors quoi qu'est-ce qu'est-il arrivé?, me demanderez-vous.

    Je suis Japonais, j'ai une langue avec plein de mots dedans mais je ne sais pas écrire. Du tout. (Les Kana dériveront des Kanji, après après après). Je vois que mon voisin a déjà une écriture et que cette écriture exprime des idées. Cool, je vais lui piquer et mettre les idées sur mes mots. Par exemple, le voisin dit «ichi» (enfin c'est ce que j'entends avec mes oreilles japonaises) pour dire «un», alors que moi je dis «hitotu». Qu'à cela ne tienne, j'ai compris qu'il utilise le caractère 「一」pour dire «un» alors maintenant je vais pouvoir écrire «hitotsu», je vais écrire 「一」et le tour est joué.

    Si j'ai plusieurs mots dans lesquels je veux utiliser ce «un» (par exemple «premier»), alors le caractère va prendre autant de prononciations différentes, qu'on différenciera par le contexte. Après tout, je ne sais pas écrire, je ne vais pas râler, c'est déjà drôlement bien d'avoir quelques caractères, même s'ils ne sont pas fait pour mon langage qui n'a vraiment rien à voir avec celui du voisin.

    Par exemple, «J'ai 一 chat.» J'ai un chat et «C'est mon 一 chat.» C'est mon premier chat, parce que ça «va de soi» qu'on ne va pas utiliser l'un pour l'autre et qu'on comprend bien de quoi on parle.

    C'est ce qu'on appelle la (les) «prononciation(s) Japonaise(s)» d'un caractère, ou prononciation «Kun».

    • Partie 3B

    Bon, maintenant je suis toujours Japonais mais j'ai décidément beaucoup discuté avec mon voisin, il m'a enseigné plein de caractères et je suis super content. Mais il utilise des mots sympa aussi, alors j'ai envie de lui en emprunter et de les utiliser à mon tour. Par exemple, j'aime bien sa façon de compter, je la trouve plus énergique que la mienne et comme j'aime bien ce qui bouge bien (cf. arts martiaux), je vais aussi dire «ichi» pour dire «un» à partir de maintenant.

    C'est ce qu'on appelle la prononciation «chinoise» d'un caractère, ou prononciation «On».

    Et puis certains mots, concepts intéressants existent chez mon voisin et pas chez moi, alors je vais finalement lui piquer tout un tas de mots et une fois sur deux garder leur prononciation d'origine (remaniée, bien sûr, regardez comme je change les mots anglais pour les intégrer de la même façon) puisque je n'ai pas d'équivalent, une fois sur deux prendre une de mes prononciations japonaises d'un caractère équivalent pour me fabriquer un mot «à la japonaise». héhéhé, y'en a là-dedans!

    On dit que la plupart du temps quand il y a un seul kanji dans un mot, on utilise la prononciation japonaise et que quand le mot est constitué de plusieurs kanjis, on utilise la prononciation chinoise, mais ce n'est pas toujours vrai. 

    Certains kanjis ont des tonnes de prononciations, perso je choisis d'apprendre en premier ceux qui n'en ont qu'une (et il y en a beaucoup!) et les clefs.

    CétypluklèR???



  • on:  ない
    kun:




    C'est un kanji très pratique, surtout quand on navigue sur des sites web (サイト) et qu'on cherche du contenu gratuit (無料むりょうgratuit).
    C'est aussi le kanji qu'on écrirait si on écrivait 「ない」avec un kanji (無い).

    Il signifie contraire, néant, rien. On le retrouve donc dans un nombre très important de mots, un peu comme le "-less" anglais en fin de mot.

    J'ai repéré un むしょう(gratuitement, sans compensation) dans Détective Conan quand il s'étonne que Kogoro fasse un travail sans récompense de quelque sorte. (ep. 661-662).

    Il y a bien sûr les indispensables 無理 (むりimpossible) et 無駄 (むだinutile).

    Un avec pour finir, 無礼ぶれいimpoli, rude).
    C'est le même れい (remerciements) que しつれい mais la signification est plus terrible. しつれい indique ainsi une erreur de politesse alors que ぶれい en indique une absence totale.

    C'est aussi le れい de la salutation en classe quand le ou la déléguée invite la classe en début de cours à saluer le professeur.


  • 部首(ぶしゅ)signifie clef, radical, comme dans clef de kanji.

    Ce sont les 214 perles rares qui vous permettront plus ou moins de deviner la signification d'un kanji et qui vous faciliteront l'apprentissage de tout un tas de ces mêmes kanjis.


    J'ai trouvé quelques références sur internet, mais jamais tout ce que je cherchais au même endroit. Je ferai donc le travail ici. Mon objectif? Rassembler toutes les données importantes sur chaque clef ET sur chaque kanji n'utilisant QUE cette clef, autrement dit la clef sous sa forme de kanji.

    J'ai aussi trouvé un livre (en papier) sur les clefs chinoises (le mêmes donc, mais la prononciation et les mots dérivés sont... comment dire... bref, en plus c'est pas dans l'ordre donc j'ai un boulot énorme à fournir là-dessus, mais je pense que ça vaut la peine) et leur histoire, avec un texte (en français!) et des gravures d'époque pour chaque.

    Vous trouverez donc bientôt ces clefs apparaître une par une dans des articles que j'espère complets sinon exhaustifs. À bientôt !

    http://www.commecadujapon.com/dokuwiki/japonais/kanji/bushu
    http://www.crapulescorp.net/japonais/cours/ecritures/kanji/bushu.php5
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_de_kanji_class%C3%A9s_par_cl%C3%A9
    http://ja.wikipedia.org/wiki/%E9%83%A8%E9%A6%96
    http://www.nihonjiten.com/nihongo/bushu/index.html




    Merci à tous ceux qui apprennent le chinois =^_^= (et qui partagent leur apprentissage sur internet ♪)






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